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Interview d’Isabelle Dommanget (Addictologue – Nevers)

Bonjour chère Isabelle !

Bonjour Boris !

Comment vas-tu ?

Très bien, je te remercie.

Tu nous parles de ton parcours ?

Je me suis toujours cherchée professionnellement parlant !
Après un début d’études vite avorté en Droit, j’ai passé (un peu par hasard au début, mais pas tant que ça après !) mon diplôme d’assistante sociale à Versailles en 2008. Puis je suis retournée dans mon département d’origine, l’Allier, pour exercer mon métier en centre hospitalier durant 8 ans sur différents services : Médecine-Chirurgie-Obstétrique, psychiatrie, EHPAD, convalescence, nutrition, addictologie.
J’ai vraiment accroché avec ce dernier service. Et j’ai profité d’une opportunité d’emploi dans ce domaine pour déménager dans la Nièvre, où je suis depuis bientôt 3 ans.

Ton job d’aujourd’hui, tu nous en parles ?

Alors en fait j’ai plusieurs casquettes.
Tout d’abord je suis consultante en addictologie dans un Centre de Soin, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA). C’est-à-dire que j’aide toute personne qui rencontre une difficulté avec la consommation d’un produit (tabac, alcool, cannabis, héroïne, cocaïne, médicaments, etc.) mais ça peut également être une difficulté relative à un comportement comme la dépendance aux jeux d’argent, aux écrans, au travail, au sport, au sexe, aux achats compulsifs, aux comportements alimentaires. J’aide la personne à atteindre son objectif personnel et surtout pas celui que je pourrais avoir pour elle, c’est vraiment un objectif propre à chacun. Ça peut être seulement une demande d’informations, une demande d’aide à la diminution, voire une demande d’aide à l’arrêt.
La prise en charge est faite par une équipe pluridisciplinaire de façon gratuite pour tout type de public, même les entourages.
Dans ce cadre-là j’interviens également sur les Consultations Jeunes Consommateurs (CJC) où les jeunes peuvent venir de façon anonyme pour parler de leurs consommations.
Après ma deuxième mission est d’être animatrice de prévention. J’interviens dans différentes structures comme des établissements scolaires, des missions locales, chantiers d’insertion notamment, pour aider le public à faire des choix éclairés pour sa santé (développement des compétences psychosociales, informations relatives aux addictions).
Dans ce cadre, je peux être amenée à sortir de mon champ de compétences initial d’assistante sociale car ponctuellement je fais des émissions de radio, des clips de prévention, des illustrations graphiques pour des livrets de sensibilisation, intervenir en maison d’arrêt par exemple. Et c’est cette diversité de missions qui rend mon poste passionnant.
Enfin j’ai également un petit temps en tant que formatrice en addictologie pour des entreprises, des partenaires avec lesquels je travaille.

Une réussite à nous faire partager dans le cadre de ton activité ?

Ce sont surtout les usagers que je vois qui peuvent en avoir. Moi je ne fais qu’essayer de les mettre sur la voie. Mais on va dire que je suis satisfaite du travail accompli quand j’ai pu aider une personne à comprendre pourquoi elle a un souci avec un produit psychoactif ou un comportement de dépendance.
Car si une personne ne fait que travailler sur la consommation seule, et pas sur le pourquoi elle a cette consommation, qu’est-ce que ça lui apporte, alors on a tout loupé. Mais je considère que c’est sa réussite à elle. Et non la mienne !

Parle-nous de tes passions !

J’adore les mangas, que ce soit en livres ou en animés. J’aime en particulier ceux de Hayao Miyazaki que je trouve magnifiques et très intéressants car ils ont plusieurs niveaux de lecture, ils sont adaptés tant pour les enfants que pour les adultes, ils délivrent de jolis messages il me semble.
Après j’aime les promenades en forêt, faire du vélo, la décoration, l’informatique, le bricolage, les animaux.

Ton quotidien, ça ressemble à quoi ? Du temps pour toi ?

Je commence ma journée par un bon petit-déjeuner tout en prenant le temps de consulter mes mails et les actualités du jour.
Après, en fonction des jours, mon quotidien est rythmé mes entretiens avec les usagers que j’ai en suivi et/ou mes actions de prévention, des réunions.
Sortie du travail, je m’accorde une petite pause canapé-Netflix-plaid-boisson chaude.
Et j’essaie de me remettre au sport en faisant du badminton. J’arrive à prendre du temps rien que pour moi, pour mes proches également, c’est indispensable.

Comment as-tu découvert « Sans Mon Portable » ?

Par LinkedIn.

La Digital Detox, ça te parle ?

Oh oui ! J’essaie autant que je peux de la pratiquer, même si j’aimerais m’y consacrer davantage.

Si je te dis que mon métier c’est Coach en Digital Detox, tu penses à quoi précisément ?

Que tu n’es pas prêt d’être au chômage ! Et que tu es un professionnel plein d’avenir qui va être de plus en plus indispensable pour nous aider à décrocher sereinement de nos écrans et du net.

L’hyperconnexion, une vraie addiction selon toi ?

Hélas oui. Et elle est en plein essor. On voit de plus en plus de personnes qui se retrouvent littéralement mal si elle n’ont plus de réseau, plus de batterie ou plus de téléphone ! Elles sont perdues, peuvent même devenir agressives et ne savent plus quoi faire, certaines sont comme amputées d’une part d’elles-mêmes.

Quelle est la population la plus « addict » à ton avis ?

Les jeunes clairement. Des tous petits jusqu’aux jeunes adultes. Mais ça peut s’entendre car ils sont véritablement nés dans une société hyperconnectée. C’est un véritable repère pour eux, une habitude tellement naturelle. Le souci est que beaucoup ne savent plus s’amuser sans écrans. Ils s’ennuient, tournent en rond. Alors que cet ennui est salvateur il me semble, car ça les aide à faire de l’introspection, à être attentif à leurs émotions, leurs sensations, celles des autres. Malheureusement, beaucoup ne prennent pas le temps de « s’ennuyer » et ils se construisent avec des repères parfois un peu bancals, ils sont noyés dans un flot d’informations, de contenus qu’ils prennent pour la norme. C’est vraiment dommage je trouve.

Comment aider cette population ?

Je pense que l’écoute est une première chose pour voir quels bénéfices ils retirent des écrans, du portable. Mais il est important de les aider à se connaître réellement. Eux-mêmes, mais également entre eux. À accepter leurs différences, leurs particularités, leurs qualités pour qu’ils puissent les développer à bon escient et que l’écran ne soit plus leur valeur refuge. Qu’ils puissent voir qu’ils ont en eux et autour d’eux une multitude de sources de plaisir autre que le portable et internet.
Mais ça demande un changement d’habitudes également des adultes ! Et là, nous avons aussi du travail…

Ton portable à toi, c’est plutôt un ami ou un ennemi ?

Les deux. Car il est très pratique, mais il peut également être un ennemi car la multitude de contenus peut vite nous embarquer dans une perte de gestion du temps qu’on y passe.

A quel moment apprécies-tu le plus de le lâcher ?

Lorsque je vais me coucher.

Quelle est pour toi la meilleure manière de déconnecter ?

S’organiser régulièrement des temps de déconnection pour retrouver des petits plaisirs simples comme par exemple lire un vrai livre, regarder un coucher de soleil, passer une soirée avec des proches sans avoir à regarder sans cesse son téléphone et pouvoir profiter du moment présent.

Où irais-tu pour te déconnecter ?

En forêt.

Tes projets à court terme ?

J’aimerais déménager dans une petite maison avec jardin et cheminée.
Et professionnellement parlant, continuer à participer à des projets de prévention en addictologie qui me boostent et m’aident à développer ma créativité.

Une idée d’événement déconnecté à organiser ensemble ?

Une journée déconnectée en établissement scolaire avec plein de jeux coopératifs et de découverte.
Et si tu souhaites adhérer à notre association et soutenir ses actions c’est ici… https://www.helloasso.com/associations/sans-mon-portable/adhesions/adhesion-a-l-association-sans-mon-portable-1
C’est noté.
A bientôt chère Isabelle, donne de tes nouvelles !
Merci à toi et à très bientôt !