Interviews

ITW d’Aurélien Guihéneuf (Hypnothérapeute – Paris)

Aurélien Guihéneuf

Bonjour Aurélien Guihéneuf ! Je suis très heureux de donner aujourd’hui la parole à un acteur de la Digital Detox ! Tu veux bien que je t’appelle comme cela pour le moment ?

Oui pourquoi pas ! Le terme “digital detox” semble parfois un peu “fourre-tout”, mais il est parlant dans le sens où en effet, notre rapport au digital est parfois excessif voire addictif, et qu’il peut sembler important de s’en détacher… sans diaboliser ni idéaliser les outils numériques, mais simplement s’en éloigner un peu pour trouver un meilleur équilibre. Enfin, on aura l’occasion d’en reparler dans les prochaines questions 🙂 

Raconte-nous un peu ton parcours…

J’ai travaillé pendant plus de 10 ans dans la communication, et plus spécifiquement dans le digital (animation de réseaux sociaux, élaboration de stratégies digitales, mise en place d’opérations de buzz, d’influence, etc). Et puis, après toutes ces années j’ai senti le besoin de changer de voie, de rétablir un peu plus de contact avec ce qui m’avait intéressé initialement dans la communication, et que je n’ai en réalité jamais trouvé… à savoir : le relationnel et la créativité. Après quelques temps d’introspection, de façon autonome mais aussi accompagnée, j’ai mis à plat ce qui était vraiment important pour moi et il m’a semblé évident que ce métier de communication, tel que je le connaissais, ne me correspondait pas / plus. Il fallait me réinventer. Et puis, l’hypnothérapie est apparue dans ma vie, et je me suis lancé dans cette nouvelle voie à fond ! Beaucoup de personnes dans mon entourage semblaient penser que je changeais complètement de direction, mais en réalité il y a beaucoup de liens entre mon précédent métier, et l’hypnothérapie : je dis souvent que je suis passé de la communication “grand public” à la communication “interpersonnelle”. L’hypnose est une forme de communication, et la thérapie en général est un échange, qui se fait à deux… Et puis dans ce métier, le relationnel et la créativité ont une place bien plus importante et authentique que dans le marketing ! Aujourd’hui, je me sens totalement à ma place et bien plus “utile” : je suis ravi de pouvoir accompagner des personnes vers le changement, surtout lorsqu’il s’agit de les aider à se développer ou se sentir mieux, sortir d’une impasse ou se reconnecter à eux-mêmes et à leurs ressources. Aujourd’hui, en parallèle de mon activité en cabinet, je produis aussi un podcast nommé “Douceur Cactus” à propos des addictions numériques, et je fais régulièrement des conférences sur ce sujet ou sur d’autres thèmes… de nouveaux projets sont aussi en cours et verront le jour bientôt !

Qu’est ce qui t’a amené à t’intéresser aux addictions numériques ?

Dans le cadre de mes précédents emplois, j’ai passé énormément de temps sur les réseaux sociaux, les téléphones, etc. J’ai parfois ressenti que tous ces outils numériques prenaient trop de place dans mon esprit, dans ma vie, dans mon emploi du temps… alors que quand je m’en éloignais, je ne m’en portais pas plus mal ! En parallèle, j’ai souvent trouvé que les addictions numériques étaient un vrai sujet de société, par lequel tout le monde semble se sentir plus ou moins concerné, mais que la façon dont c’est abordé dans les médias ou dans les discussions de comptoir était trop imprécise ou trop extrême, un peu trop manichéenne (tout noir / tout blanc)… et finalement avec ce type de discours il me semble difficile pour n’importe qui de s’y retrouver, de comprendre comment cela fonctionne et comment agir concrètement. Alors naturellement, quand j’ai repris mes études pour apprendre l’hypnothérapie, j’ai fait le lien entre mon histoire et cette volonté d’être utile, d’ouvrir les esprits, et je me suis spécialisé (entre autres sujets) dans les addictions, et en particulier les addictions numériques. Mon objectif, à ce sujet, est de donner des clés à chacun pour comprendre cette problématique, sensibiliser de façon saine et constructive, pour que chacun puisse l’intégrer à sa propre vie, à ses propres besoins, et finalement trouver le bon équilibre.

Quel est le profil le plus courant de tes clients / patients ?

J’accompagne des personnes de tout âge, parfois des enfants et parfois des retraités, mais principalement des personnes de 25 à 45 ans. Les sujets pour lesquels on me consulte sont très régulièrement ceux de la confiance en soi ou l’estime de soi, mais aussi des problématiques de gestion des émotions, de gestion du poids, de phobies, de sommeil… et parfois d’addictions ou de troubles du comportement bien sûr.

En quoi l’hypnose est-elle d’un grand apport ?

L’hypnose est intéressante dans le sens où elle permet d’accéder à la partie inconsciente du cerveau de façon très directe et rapide, cette partie de nous qui renferme tous nos automatismes, nos émotions, notre rapport émotionnel aux choses, et donc aussi nos peurs, nos blocages, nos envies, nos besoins… L’hypnose permet de faire un travail de fond sur la source d’une problématique au-delà de ses symptômes. Cela en fait une approche très personnelle, adaptative et suggestive pour opérer le changement dont on a besoin. 

Parle-nous de tes plus belles fiertés dans ta mission d’aujourd’hui ? 

Sans parler d’exemple spécifique, observer l’efficacité des séances est très gratifiant… lorsqu’une personne te laisse un témoignage qui dit qu’elle se sent enfin libre, ou qu’une personne revient pour une nouvelle séance avec un sourire et un plaisir de sentir le changement s’opérer de jour en jour depuis la séance précédente, c’est vraiment génial. Les réactions instantanées à la fin des séances aussi sont passionnantes : le partage d’impressions, de sensations, les étonnements… Et puis d’une façon générale, les rencontres, les échanges avec les personnes que j’accompagne, sont très enrichissants !

Quels sont tes autres centres d’intérêt, à part ton métier ?

J’aime beaucoup la musique, le cinéma, les podcasts, l’écriture et puis je pratique le Yoga Bikram depuis 9 ans (un yoga chauffé à un peu plus de 40° durant 1h30… qui semble un peu trop extrême pour certains, mais que j’adore et qui me fait toujours un bien fou) !

Suivre une Digital Detox, ça consiste en quoi selon toi ?

Pour moi, il s’agit surtout de dépasser l’idée de suivre les “règles” que l’on peut lire ci et là dans les magazines ou sur internet ; il ne s’agit pas seulement de procéder à des ajustements du type observer son temps d’utilisation des écrans ou supprimer ses notifications… même si c’est toujours un bon début 🙂 Pour moi, il s’agit surtout de se poser les bonnes questions, de façon personnelle, pour connaître ce qui est vraiment important pour soi, ce qu’on souhaite modifier dans notre comportement, ce qu’on souhaite garder… mais aussi (surtout ?) d’identifier ce que cachent nos mauvaises habitudes et notre utilisation excessive des outils numériques. Est-ce une peur de l’ennui, une façon de fuir des choses plus importantes, une façon de gérer ses émotions ou son besoin d’attention, d’affection, d’amour, etc…? Pour résumer, je préfère l’angle d’attaque individuel quand il s’agit de rééquilibrer son rapport au digital, plutôt que de suivre des grandes règles qui seraient censées être magiques et convenir à tout le monde. Il me semble que cette approche plus personnelle, personnalisée, est plus valorisante et efficace à long terme, pour chacun et donc finalement pour tout le monde. Les addictions numériques sont en effet un sujet de société, mais selon moi il doit être aussi abordé de façon individuelle. Une “digital detox” peut être l’occasion de mieux se connaître et se respecter.

Quelle est la population la plus touchée par l’addiction aux écrans selon toi, et pourquoi ? 

J’ai le sentiment que tout le monde est un peu concerné par cette problématique… mais qu’on a tendance à se focaliser de façon injuste et un peu malhonnête sur les générations les plus jeunes (digital natives, génération Z, etc.) ; j’ai d’ailleurs consacré l’épisode 18 de mon podcast “Douceur Cactus” aux ados, et l’épisode 5 plus spécifiquement sur les enfants ! En réalité, certaines personnes de 60 ans peuvent aussi se sentir dépendantes (voire plus que des ados) du téléphone, des réseaux sociaux ou des jeux en ligne ! Je me demande d’ailleurs si focaliser sur les enfants et les ados n’est pas une manière de détourner le sujet, pour ne pas admettre que tout le monde est un peu concerné et responsable, adultes y compris… En tout cas, je ne suis vraiment pas certain qu’un type de population soit “plus touché” qu’un autre. Néanmoins, de façon objective, les personnes qui sont les plus touchées sont celles qui souffrent le plus d’une utilisation excessive et incontrôlable des écrans, et qui sont face à des conséquences néfastes dans leur vie (isolement, troubles du comportement, échec scolaire ou professionnel, etc.).

Le manque d’exemplarité des parents joue-t-il selon toi un rôle majeur, dans l’addiction des plus jeunes ? 

Je pense qu’il joue un rôle, oui, mais je ne dirais pas majeur : il me semble que les parents ont surtout un rôle dans l’éducation des plus jeunes aux risques et dérives. Cela passe bien sûr par le fait de montrer l’exemple, mais comme je le disais plus haut, mieux on comprendra comment tout ça fonctionne, plus il sera simple et évident d’intégrer de bonnes habitudes, de trouver le bon équilibre, et d’expliquer aux enfants de façon objective et sans affect quelle place donner aux écrans dans leur vie. Des parents qui ont un rapport sain aux écrans peuvent transmettre des valeurs saines à leurs enfants sur ce sujet.

Ton portable à toi, comment lui fixes-tu des limites ?

Tout d’abord, je le mets presque toujours en mode “ne pas déranger” : j’aime l’idée de le consulter quand je le souhaite, sans que ce soit lui qui contrôle mon attention. Cela m’évite aussi l’effet “instantané” qui se déclenche souvent quand on reçoit un message ou une notification, qui nous donne envie d’abandonner ce qu’on fait pour y répondre ou regarder tout de suite ce dont il s’agit, ce qui est mentalement épuisant à la longue… Et puis d’ailleurs, il y a bien longtemps que j’ai revu toutes mes notifications pour ne conserver que celles qui me sont vraiment “utiles” ou agréables. Enfin d’une façon générale, je lui fixe des limites en me fixant des limites : j’apprécie parfois de faire le choix de me couper de lui, de décider de le laisser à la maison en sortant ou de l’éteindre quand je me balade. Pratiquer la déconnexion choisie, de façon consciente et volontaire.

Il ressemble à quoi ?

C’est un iPhone, dont j’essaie de prendre soin pour le conserver le plus longtemps possible ! Ce n’est pas le dernier cri ni le plus puissant mais il me convient largement.

A quel moment apprécies-tu le plus de le lâcher ?

Je pense que c’est quand, le matin, je me lève sans le regarder ni même l’allumer ! Parfois, j’oublie même qu’il n’est pas encore allumé, je ne m’en souviens que deux ou trois heures après m’être levé et c’est agréable de profiter de moments où l’on n’est pas rattaché au monde extérieur ! L’autre facette de la déconnexion choisie, c’est aussi la connexion choisie, c’est-à-dire partir du principe que notre état “ordinaire”  puisse être celui de la non-connexion, et que la connexion est un choix, pas une obligation ni un fait établi. Dans la même idée, lorsque je pratique le yoga, j’aime faire en sorte que le cours débute bien avant que j’entre dans la salle, alors j’aime bien couper mon téléphone quelques instants avant même d’arriver au studio : ainsi, l’expérience moment pour soi, de concentration, de méditation, d’introspection, que peut représenter la pratique du yoga, me semble encore plus longue et agréable !

Ta recette à toi, pour ta déconnexion personnelle ? 

J’essaie d’être le plus lucide et à l’écoute possible en ce qui concerne les émotions qui se cachent derrière mon utilisation excessive du téléphone : peu à peu je parviens mieux à observer les moments où j’utilise mon téléphone de façon compulsive ou automatique sans but précis, ou avec un but qui ne me semble pas vraiment valable (pour passer le temps, pour éviter de faire quelque chose d’important, pour avoir des likes et des commentaires…). Avec ce “travail de fond” j’essaie de mieux percevoir les moments où j’utilise mon téléphone de façon néfaste, et donc je peux plus facilement avoir le réflexe de m’éloigner du téléphone car je sais que ça ne peut me faire que du bien. Et puis, j’essaie aussi d’anticiper ces moments où la durée d’utilisation du téléphone s’étale un peu trop malgré tout, en ayant en tête des activités déconnectées que j’apprécie : ainsi, plutôt que de continuer de façon “faussement confortable” à utiliser cette machine encombrante, je peux passer à autre chose et profiter de mon temps autrement. Ca allège, ça libère !

Tu as un compte Instagram, est-ce contradictoire avec tes convictions ? (On me taquine souvent avec cela…je partage !) 😉 

Ma conviction est justement qu’il ne faut pas bannir les outils numériques de nos vies ! Ça serait ridicule, voire “contre-productif” : ce sont des outils formidables dont il pourrait être dommage de se passer, pour certains aspects  de ce qu’ils ont à nous offrir. En l’occurrence, j’aime bien Instagram. Mais bien sûr, le tout est de trouver le bon équilibre et d’utiliser ces outils d’une façon qui nous convienne vraiment ; et justement, je crois que mon rapport à Instagram est plutôt sain 🙂

Quels sont tes projets à court terme ? 

Je ne peux pas encore tout dévoiler dans le détail, mais je travaille actuellement sur un nouveau podcast au sujet du sommeil, et je prépare une conférence sur les addictions numériques qui devrait avoir une jolie exposition sur internet… Par ailleurs, j’écris deux livres qui devraient être publiés au début de l’année 2021, dont un sur la relation au smartphone et les bonnes pratiques pour mieux l’équilibrer !

La dernière version de notre site sansmonportable.com recense « les trésors », les lieux notamment, hôtels, restaurants, endroits cachés où la déconnexion prend tout son sens. 

Tu en connais un à nous faire partager ici ?

Je pense à un endroit qui s’appelle Meiso et qui propose des expériences d’isolation sensorielle dans des caissons de flottaison : c’est un moment tellement particulier que la déconnexion est totale ! Je pense aussi au restaurant “Dans le noir” qui propose une expérience sensorielle très particulière également (manger dans le noir total), où la déconnexion prend tout son sens aussi. Et puis bien sûr les cinémas, les massages, les piscines ou les salles de yoga… tous ces moments d’isolement par excellence !

Notre site te permettra aussi de te faire connaître auprès de notre réseau…prêt à ouvrir ton compte, créer ta fiche ?

Mais oui, avec plaisir ! 

Et si nous imaginions un événement ensemble, une action, un Webinaire (faute de mieux…) une conférence pour développer notre visibilité et nos savoir-faire communs, tu serais partant ?

Avec plaisir également ! J’aime beaucoup partager et essayer d’ouvrir les esprits sur le sujet des addictions numériques, de façon simple et abordable pour tout le monde.

Si par bonheur tu voulais soutenir l’association, pour 1 an, tu trouveras ici pour 15€, le lien te permettant d’apporter ta contribution…

https://www.helloasso.com/associations/sans-mon-portable/adhesions/adhesion-a-l-association-sans-mon-portable-2020-2021

Merci pour le lien, je suis partant pour soutenir l’association et prendre part à son développement 🙂 

Et si on souhaite suivre ton actualité ? Où te retrouver ?

Mes réseaux sociaux portent tous le nom de @auneuf, et mon site aussi : www.auneuf.fr (j’ai aussi une newsletter à laquelle on peut s’inscrire sur simple demande !).

A très bientôt cher Aurélien, restons en contact !

Avec plaisir !

 

Toutes les interviews de Sans Mon Portable sont ici.

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